Sinn fein – Ni hon unan – Noi stessi*…

Il y a longtemps que les Irlandais ont appris que les peuples colonisés ne peuvent compter que sur eux-mêmes (Sinn fein). L’épisode rocambolesque de la dissolution de l’Assemblée nationale française, après la déroute aux Européennes du parti du Président, finira-t-il par ouvrir les yeux des Corses ?

Exit le processus de Beauvau. Exit le CHU de Corse. Dissous en même temps qu’une Assemblée nationale qui offrait depuis son élection un spectacle ressemblant plus aux jeux du cirque qu’à l’exercice de responsabilités représentatives. 

Depuis des mois, les députés corses dits nationalistes, le Président de l’exécutif et même son challenger de Portivecchju essayent de nous faire croire pourtant que la Corse a, grâce au Président de la République française et aux députés français, une opportunité historique : un accès à l’autonomie — bon, d’accord, sans pouvoir législatif, mais, à défaut, avec le pouvoir des mots ! —, et, en attendant, bientôt un CHU grâce à l’accord unanime de la Commission des finances sur la proposition de loi de notre député, le Docteur Colombani !

Et patatras ! D’un simple paraphe sur un décret de dissolution, Emmanuel Macron, vexé de la déroute de son parti ce 9 juin, détruit tous ces espoirs ! Quel que soit le résultat des élections législatives de juillet, tout sera à remettre sur le métier. Car en France, le bien public n’est que le bien de l’Etat, et celui-ci impose son calendrier. Ce n’est pas le sort de 300 000 Corses qui influencera ce calendrier !

Si cet épisode pouvait servir enfin à déciller les yeux de nos compatriotes ! Jamais la moindre avancée pour la Corse ne procédera de la bonne volonté de l’Etat français, qu’il s’agisse du gouvernement ou de son corps législatif, sans qu’un rapport de force extrêmement puissant ne l’impose. Et, quand un tel rapport de force existera — parce qu’il existera un jour, ne serait-ce que parce que la France elle-même se dissout peu à peu —, sa traduction en avancées statutaires devra être très rapide. Les Kanaks sont en train de mesurer à quel point le temps, avec l’Etat français, est toujours un allié du pouvoir en place…

Nous-mêmes ne signifie pas nous seuls. Bien évidemment, les Corses ont besoin d’alliés pour imposer des changements à la France. Mais ces alliés, nous l’avons écrit par ailleurs, ne sont pas et ne seront pas trouvés dans le marigot politicien d’un pays qui a perdu depuis des lustres le vrai sens de la politique. Et, avant de chercher des alliés ailleurs, il est temps de mobiliser les Corses eux-mêmes sur une perspective claire. Les discussions de Beauvau auraient pu le permettre si l’exécutif corse ne s’était pas fourvoyé dans un processus purement institutionnel, parsemé de lignes rouges imposées par l’Etat, et dont le grand absent a été… le peuple corse lui-même. 

Mais, dans la vraie vie, il n’y a pas d’échec, seulement des occasions d’apprendre et d’avancer. Puissent ces derniers soubresauts de la pulitichella à la française nous donner l’occasion de remettre enfin à l’endroit le paysage politique corse. Le temps n’est plus aux “coups tactiques”, aussi brillants fussent-ils. Il faut une véritable stratégie alternative. Et la seule vraie alternative à la décadence désormais inéluctable de la Corse française, c’est une Corse indépendante. 

Le chemin sera peut-être long, mais il n’y en a pas d’autre. Et il nous faut le tracer nous-mêmes. Sinn fein, ni hon unan, noi stessi. Indipendenza, sola sperenza !